Agathe Corgié-Treseler : « L’iaelyon, une école incontournable »

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Si vous pensiez qu’il fallait une vocation pour trouver sa voie, cette histoire est de celles qui recadrent vos jugements et désossent vos préjugés. Frappante illustration que celle d’Agathe, où les vacillements de carrière et les vicissitudes de la vie ne sont jamais parvenus à l’arracher au précieux conseil de sa mère : « sois libre et indépendante ! ». Aujourd’hui à la tête de son propre cabinet, cette experte-comptable a su tracer sa route au gré des coups de coeur et malgré les coups durs.

Ne ménageant pas ses efforts pour faire bouger les lignes de sa profession, elle s’est engagée d’un pas ferme et décidé, dans la défense de ce qui transforme la fonction en passion : l’Humain. Conjuguant l’envie de bien faire à la volonté de faire le bien, elle s’est attelée à prouver que l’ambition n’est pas une affaire de portefeuille, et encore moins un délit d’orgueil.

Avant d’endosser son costume d’experte, Agathe rêvait de revêtir la blouse blanche : « J’ai beaucoup admiré une amie de mes parents qui était ophtalmologue. Cette femme était un modèle, et c’est elle qui m’a donné envie de suivre cette voie ». À l’école de médecine, c’est pourtant le désenchantement du monde qui la guette. C’est pourquoi, la jeune femme décide de résister à sa destinée après deux ans d’idéalisme bousculé, et de bachotage indigeste. Grâce à une partenaire de galère, embarquée avec elle dans le tourment des aspirants docteurs, Agathe va finalement choisir de ramer sur d’autres eaux et vers une terre inconnue : « Je voulais absolument exercer une profession libérale pour être libre et ne pas vivre sous une quelconque autorité. Quand elle m’a raconté la vie de son père expert-comptable, ça laissait rêveur ». Ni une, ni deux, elle démarre sa reconversion avec un BTS Comptabilité. Parce qu’on ne passe pas de novice à experte en un claquement de doigts, Agathe réapprend à compter jusqu’à huit pour autant d’années d’étude : « C’était tout ou rien. Soit j’arrivais au plus haut niveau, soit j’arrêtais tout pour devenir fleuriste », affirme-t-elle, sans fléchir dans son aplomb. Finançant ses études en servant cocktails et sourires au gotha lyonnais, la future experte enchaîne les diplômes : DECF, DESCF et le sacro-saint DEC.

La plus grande qualité d’un expert, c’est l’écoute

Sans perdre de temps, elle lance en 2010, son propre cabinet : Treseler & Co. Libérée de toute contrainte hiérarchique, elle conserve son éthique et met en place une expertise comptable de proximité : « La plus grande qualité d’un expert, c’est l’écoute. Tous mes clients ont mon numéro de portable personnel et savent qu’ils peuvent m’appeler quand ils veulent ». Tendre l’oreille avant la facture, une attitude qui détonne dans un marché dominé par « la guerre des gros » ! Comme une revanche sur son rêve déchu, Agathe est devenue le médecin de campagne des petites entreprises, n’hésitant pas à traiter le vague à l’âme en plus de la santé financière : « J’adore ce rôle de confidente et ce lien de confiance partagée avec mes clients », lâche-t-elle dans un de ces longs sourires dont elle n’est jamais à court. Une bienveillance qui sait faire place nette à un caractère bien trempé quand l’ambiance délétère tente de s’imposer. En témoigne une association aventureuse dont le démarrage fut aussi fertile que le dénouement hostile. Mais dans le creux de la vague, Agathe sait rompre le combat quand elle sent ses principes plier. Malgré le fracas des tracas, le grondement des engagements prend toujours le pas. Depuis, Treseler & Co a repris des forces. Temporairement perchée en haut d’un espace de co-working où se croisent startups en devenir et artistes en effervescence créative, Agathe a repris la main sur son entreprise en s’entourant de personnes de confiance : « Ma plus proche collaboratrice n’avait jamais fait de comptabilité, mais elle a toujours été là dans les coups durs, et ne m’a jamais fait faux bond ». Et qu’importe l’allure, le contact et le feeling restent les cases sur lesquelles Agathe mise invariablement. Les baskets peuvent bien faire l’affaire tant que leur propriétaire promet de rester droit dans ses bottes. Une vision aussi tolérante que pertinente qu’elle fait valoir en tant qu’élue à l’Ordre des Experts-Comptables Rhône-Alpes. Un souci de la protection du métier qui s’est imposé durant les six années lumineuses passées auprès de Jacques Maureau, Président émérite.

Dans cette profession réglementée où les pratiques ne sont pas toujours réglementaires, Agathe sait se montrer retorse et n’hésite pas à mettre la main au collet aux professionnels peu scrupuleux : « Mon fils pense parfois que je suis commissaire de police à cause de mon macaron. Je n’ai pas vraiment démenti ; j’adore attraper les méchants » ajoute-telle en plaisantant. Mais Agathe ne tire pas à l’aveuglette. Elle part surtout à l’attaque des clichés, en supervisant la commission de promotion qui a pour objectif de redorer le blason de l’expertise-comptable auprès des jeunes. Dans ce cadre qu’elle tente d’élargir, elle organise rencontres, forums et accompagnements des étudiants. Une entreprise de dépoussiérage et de renouvellement d’image dans laquelle l’iaelyon s’est faite une place de choix : « C’est une école incontournable. Quand on fait un forum Stud’Expert, sur cinq cents étudiants, plus d’une centaine viennent de l’iaelyon. Et c’est aussi un milieu très optimiste qui porte un regard positif sur les projets et la jeunesse ». Parce qu’elle ne veut pas laisser l’avenir de sa profession entre les mains des gros cabinets, Agathe n’hésite pas à enfoncer les portes, quitte à faire sauter quelques verrous : « Je crois qu’il faut vraiment voir au-delà de notre petit milieu. Pour inventer, la clé se trouve toujours dans l’interprofessionalité ». Et si cette ouverture fait grincer quelques dents, l’important pour elle est de garder l’avenir en ligne de mire. Pour conférer aux potentiels confrères l’envie de rejoindre la famille, elle n’hésite pas à passer ses jours à mettre en place « La Nuit qui Compte », une rencontre entre professionnels et étudiants, véritable point d’orgue de son combat : « On casse le formalisme en organisant une rencontre thématique déguisée. On invite aussi des nondiplômés qui travaillent dans le milieu afin d’apporter un regard nouveau sur notre domaine ».

Parce que les engagements les plus nobles ne se mesurent pas à l’écho de la sonnante et trébuchante, notre experte consacre quelque huit cents heures par an au service de ce qu’elle croit juste : « Quand on s’engage dans quelque chose, il faut le faire à fond ». Pour mener de front toutes ces activités, la Lyonnaise prend le temps de souffler en s’inspirant des grands espaces et en gardant ses désirs d’évasion pour les immensités polaires. Comme Candide, cette femme qui a besoin « de gratouiller la terre » nous rappelle combien il est bon de cultiver son jardin.

« think large » est le slogan de l’iaelyon, que vous évoque-t-il ?
« L’ouverture vers le monde extérieur et la question de la tolérance, évidemment ! »

Et s’il fallait faire le portrait de l’iaelyon ?
« Une personnalité tentaculaire et touche-à-tout, constamment dans une dynamique projet. »

© TRAFALGAR MAISON DE PORTRAITS – 2017

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